Ce que Tocqueville m’a enseigné : 

Tout ce que la Révolution a fait se fût fait, je n’en doute pas, sans elle ; elle n’a été qu’un procédé violent et rapide à l’aide duquel on a adapté l’état politique à l’état social, les faits aux idées et les lois aux mœurs[1].

[1] L’Etat social et politique de la France avant et depuis 1789,1836, la dernière page.

- Les États généraux de 1789 ont exalté l’espoir du peuple, les cahiers de doléances l’a mobilisé dans l’ensemble de la France, toutes les forces se sont réunies à Paris. Dès que l’attente du peuple a été perdue, la Révolution est devenue inéluctable, car toutes les conditions pour sa naissance étaient préparées.

 

    Le régime qu’une révolution détruit vaut presque toujours mieux que celui qui l’avait immédiatement précédé, et l’expérience apprend que le moment le plus dangereux pour un mauvais gouvernement est d’ordinaire celui où il commence à se réformer[2].

[2] L’Ancien Régime et la Révolution, 1856, Livre III, Chapitre IV

- Le moment le plus dangereux est celui où un mauvais gouvernement simule la réforme. En fait, au début, sa réforme est un leurre, car aucun mauvais gouvernement ne veut une réforme sincère.

 

La Révolution est née de mensonges.

 

Chapitre I  Le départ courageux

Le 11 octobre 1974 : naître à Shanghai

Le 5 Juillet 2005 : commencer les cours de français

 

Décembre 2006 : demander l’admission à Science Po Paris 

Mars 2007 : passer les entretiens à Pékin

Juin 2007 : recevoir l’admission conditionnelle de l’École

Juillet 2007 : démissionner de ma fonction au gouvernement

23h55 du 22 décembre 2007 : quitter Shanghai

6h40 du 23 décembre 2007 : arriver à Paris

Quand les Français s’éveilleront, je renaîtrai en France.  

 

Je m’appelle Serge

 

Le 5 juillet 2005 est un Grand Jour, j’ai un prénom français : Serge. 

Je l’ai choisi, parce qu’il est court, tout simplement. Je ne sais pas que par hasard j’ai le même prénom que Serge Gainsbourg. Il deviendra mon chanteur français préféré. La chanson Les femmes c’est du chinois est marrante.

Serge Gainsbourg - Les femmes c'est du chinois

Par contre, l’histoire de sa chanson Aux armes et cætera me semble sérieuse. 

Gainsbourg - Aux armes

Mais je suis très fier d’être « Serge » pour une autre raison, parce que je peux articuler la lettre « R ». Cela réjouit beaucoup ma professeure à l’Alliance française de Shanghai car la langue des Chinois est habile à manger du poisson avec les arêtes, pas pour prononcer le « R ».

La prononciation est le premier défi pour apprendre une langue étrangère, le « RER en grève » pour les Chinois et le « Hěnhǎo » (très bien) pour les Français qui ne prononcent pas le « H ». En particulier, les quatre tons chinois obligent les Français à chanter : « mā, má, mǎ, mà ». Mais la liaison en français perd les Chinois dans la saison : « en-hiver, en-été ». Parfois le français commet un crime oral, lorsque je dis : « J’aime bien manger les champions (champignons) » sans nez (prononciation nasal). Cela veut dire : « Je suis étrange (étranger) » sans gorge (prononciation gutturale).

Le français est une langue biologique car il attribue un sexe à tout. Je sais que le « soleil » est un homme comme il s’agit de « Yang » dans la culture chinoise et que la « lune » est une femme qui représente le « Ying ». Par contre, je ne comprends pas du tout pourquoi la Chine est une femme mais le Japon un garçon. Les Français ont-ils déjà prévu que le Japon fils trahirait sa mère Chinoise ?

Le français est une langue romantique, car il saisit l’essence de l’amour. Les Américains disent « I love you », de même les Chinois disent « wǒ ài nǐ » (Je-aimer-tu). Pour eux, le couple s’unit par amour. Par contre, les Français disent « Je t’aime », c’est l’amour qui élimine tous les obstacles entre les gens et pousse les deux à se rapprocher.

Le français est une langue aristocratique car il prépare plus de 30 costumes dans l’armoire des verbes pour six sujets. Je me sens souvent comme un révolutionnaire pénétrant au Palais du Roi car la conjugaison n’existe pas dans la langue chinoise.

Le français est aussi une langue diplomatique car il peut convaincre ceux qui ne le comprennent pas. Lors de mon voyage aux États-Unis, j’ai eu une affaire avec une agence de location de véhicule. Je n’étais pas content de sa ruse commerciale, mais je parlais mal l’anglais et cet employé américain ne comprenait pas le chinois. Or, après mon discours solennel d’une minute en français, on a abouti à un accord, alors qu’il ne parlait pas le français. Si la Chine et les États-Unis négociaient en français, il n’y aurait plus de guerre.

Parler français, make love, Vive la Paix !  Bàng jí le ! (Magnifique !en chinois)

Tout ce que l’on pourra demain laisser de côté en souriant est aujourd’hui pénible.

« Bonjour, je m’appelle Serge, j’ai 31 ans, enchanté. »

31 ans, ce n’est pas le bon âge pour apprendre une deuxième langue étrangère. Les jeunes ont une bonne mémoire, ils peuvent répéter facilement ce qu’ils écoutent. Par contre, je ne peux pas prononcer les nouveaux mots sans voir comment ils s’écrivent.

J’oublie souvent les mots que je viens d’apprendre. Il me faut mémoriser chaque mot six fois : la première fois, le premier jour où je l’apprends ; la 2ème fois le 2ème jour ; 3ème fois 4ème jour ; 4ème fois 7ème jour ; 5ème fois 14ème jour et 6ème fois 28ème jour. J’ai écrit les mots sur des milliers de petites cartes en ordre pour faire le tour du Français.

En fait, je crois que je ne suis pas habile dans la langue française, parce qu’un panda chinois ne chante pas comme un coq français aux premiers rayons du soleil. La France est ma rose charmante, mais son petit frère, le français m’empêche de l’aimer.

Heureusement, d’après les Chinois, l’anglais est la langue du commerce et le français la langue de la culture. On est donc fier de l’apprendre, inversement aux Français qui sont fiers de parler l’anglais. One english word dans une phrase française est une identité élitiste. Mais en Chine, parmi les Anglophones, les Francophones sont les grues nobles debout au milieu des poules commerçantes[1].

[1]鹤立鸡群(en pinyin : Hèlìjīqún)

Les cours de français ont lieu deux fois par semaine : mardi et jeudi 18h30-21h00. Mais je dois consacrer au moins 20 heures par semaine pour les assimiler. Ce n’est pas facile pour un responsable de la communication au sein du gouvernement. Chaque année notre administration diffuse plus de 200 communiqués de presse à plus de 30 médias. En tant que « serviteur du public [2]», [2] 公仆 (en pinyin : gōngpú)

je travaille plus sans gagner plus. Il faut répondre aux journalistes quasiment chaque soir sans délai. Je travaille chez moi pour 23 millions de Shanghaiens. C’est une tâche deux fois plus pénible que celle du Roi des Belges qui ne possède que 11,4 millions d’habitants.

Shanghai, ville magique

Or, le plus grand obstacle n’est pas le nouveau défi lui-même, mais ma vie personnelle qui est beaucoup plus agréable que celle des Français, pourtant les rois du bonheur.

Les jeunes veulent aller en France pour obtenir un diplôme afin de trouver un travail intéressant en Chine. Par contre, en tant que jeune directeur au gouvernement, aller en France ne m’apportera ni argent, ni meilleur travail, même le meilleur diplôme ne me remboursera pas. Quitter la Chine, c’est comme Marc Antoine quittant Rome. Surtout pour étudier la démocratie, ce serait ma bataille de Waterloo.

World Economies : Nominal GDP (1960 - 2020)

Ma famille s’inquiète pour moi, mes amis doutent de ma décision, les autres se moquent de moi. Tout le monde pense que je suis fou comme Don Quichotte. Cependant, l’amour pour la France et le rêve pour la démocratie se méritent. La liberté m’appelle !

Sauver la démocratie !

   Pourtant je ne suis pas un homme tenace. Mon incompétence en français me déçoit toujours. J’ai voulu y renoncer à plusieurs reprises.

En septembre 2006 avant les examens, j’ai demandé dix jours de congé pour la préparation. Je me promettais : « Si je passe les examens, je continuerai, sinon, j’arrêterai. » Je me confiais au Ciel, comme le dit un proverbe chinois : « L’homme fait ses efforts, mais le Ciel décide du destin. [1]»

[1] 尽人事, 听天命(en yinyin : jìn rén shì, tīng tiān mìng)

Heureusement, j’obtiens juste 60/100. Le professeur français exprime la volonté du Ciel.

C’est le 13 septembre 2006, la langue française me dit : « Viens, la France t’aime ! »

Depuis ce moment je ne lâche plus mon rêve jusqu’à mon arrivée en France. Je ne serai plus « Serge », je m’appellerai « Yun TAO », mon nom officiel inscrit sur ma carte d’étudiant français.

 

La prochaine section :  « Deux cents cartes » pour l’admission à Science Po

 

L'Autobiographie de Yun Tao raconte ses 12 ans d’aventures dans la démocratie française.  Se plonger dans la sagesse de la nation française ; apprendre des citoyens français ; comprendre « le mal français » ; comparer l’Occident et l’Orient ; traverser le passé, le présent et le futur ; découvrir une voie pour la Chine libre et rechercher les causes de notre « échec occidental », c’est aussi une alerte pour réveiller tous les Français qui aiment vraiment la France.

 

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